La problématique de la date

En juin 1945, les élus du conseil municipal s’interrogent sur la manière de commémorer le massacre, et notamment sur la date à laquelle fixer cette cérémonie. Conscients du risque de voir la cérémonie occultée par celle de la Libération de Paris, ils décident néanmoins de retenir la date du 25 août.

La reconstruction et l’effacement des traces

Les époux Hale devant une carte de l’Indre-et-Loire, 1946, Maison du Souvenir, musée historique sur le massacre de Maillé (Indre-et-Loire, 37).

Si pour Oradour-sur-Glane, les hommes politiques locaux et nationaux ont immédiatement eu conscience du caractère exceptionnel du massacre et ont très rapidement fait du village du Limousin l’un des symboles nationaux de la barbarie nazie, Maillé tombe rapidement dans l’oubli.

Dans le même temps, peu à peu, dans le village, la vie reprend son cours. Grâce à l’aide de l’Afrique Équatoriale Française, l’école est rebâtie très rapidement, et le village est parrainé par un couple de milliardaires américains, Kathleen et Girard Hale. Ces deux mécènes vont apporter à Maillé les biens de première nécessité, indispensables au quotidien des habitants. Des États-Unis, ils font livrer des draps, du mobilier, de la vaisselle, des vêtements et des chaussures… introuvables en France à ce moment-là.

Tandis que la reconstruction rapide du village, sur les ruines mêmes du drame, efface les traces du massacre, les cérémonies, elles, ont lieu dans un relatif anonymat en raison de l’absence de personnalités politiques de premier plan. Le silence s’installe peu à peu et le massacre devient un sujet tabou, bien qu’il soit dans tous les esprits.

Monument de G. Watkin, sculpteur, Paul Chalumeau et Philippe Mondineau, architectes, sur la route nationale 10 du village de Maillé (Indre-et-Loire, 37).
Monument de G. Watkin, sculpteur, Paul Chalumeau et Philippe Mondineau, architectes

Un procès sans aucun retentissement

Par ailleurs, même sur le plan judiciaire, l’histoire de Maillé est caractérisée par une totale discrétion.

Alors que le massacre perpétré par la Das Reich à Oradour-sur-Glane donne lieu à un important procès très médiatisé en 1954, pour Maillé, seul un sous-officier, le sous-lieutenant Schlüter, sera condamné à mort… par contumace.

Preuve de la confidentialité dans laquelle se tient ce procès, les survivants du massacre n’en entendront parler… qu’en 1994.

1994 : le cinquantenaire, un déclic

En effet, il faut attendre le cinquantième anniversaire pour qu’enfin le massacre soit évoqué publiquement. Cette année-là, les Archives départementales d’Indre-et-Loire décident de réaliser une exposition consacrée au 25 août 1944. Celle-ci, présentée dans la salle du conseil municipal du village, remporte un grand succès. Profitant de ses rencontres avec les survivants, la personne chargée de la conception de cette exposition les incite à constituer une association et à témoigner.

En 1995 est créée l’association Pour le Souvenir de Maillé, dans le but de pérenniser la mémoire du massacre. Lors de leurs réunions, les témoins commencent à se raconter leurs histoires. Au début des années 2000, ils sont sollicités pour la réalisation de deux films de témoignages : Maillé, le massacre oublié, et L’Autre 25 août.